dimanche 19 juin 2016

Chemins Toxiques

Chemins toxiques m'a de suite intrigué, notamment grâce à sa couverture énigmatique. Une chaussure seule, qui s'enfonce dans ce qui semble être une flaque d'on-ne-sait-pas-trop-quoi, mais qui n'a rien de naturel - et de net

Tamaya fait tous les soirs le chemin de l'école avec son ami Marshall. Pourtant, ce soir-là, celui-ci en a décidé autrement. Il souhaite emprunter un raccourci, et couper à-travers les bois. Alors qu'ils se frayent difficilement une nouvelle route, Chad, la brute de l'école, leur tombe dessus. Il attendait Marshall à la sortie, et semble très en colère de ne l'y avoir pas trouvé. Alors qu'il le bouscule et le met à terre, Tamaya lui vient en aide. Ni une, ni deux, elle envoie une poignée de boue au visage de Chad. Profitant de cet instant de répit, Tamaya et Marshall réussissent à lui échapper et parviennent à rejoindre leur domicile. Pourtant, le soir dans son lit, Tamaya remarque que la main avec laquelle elle a lancé la boue change d'aspect. Tout son bras finit par révéler des cloques, la peau tombe en lambeaux, quelque chose d'anormal est en train de se produire. Dès le lendemain à l'école, elle apprend également que Chad a disparu et n'est jamais rentré chez lui... Prise de culpabilité, elle décide de partir à sa recherche.

Le propos même de ce roman, c'est certainement le harcèlement scolaire. C'est le point de départ des aventures de nos trois héros. D'entrée de jeu, on découvre que Tamaya est elle-aussi victime de harcèlement. C'est l'"intello" de la classe, qui  ne déborde jamais, et rappelle même parfois à l'ordre. Elle est clairement à l'opposé des Bad boys de l'école, qui se la jouent plutôt cool à enfreindre les règles. Est-ce mal de bien se comporter ? Tamaya ne semble pas intégrée à cause de sa bonne conduite. Première interrogation.
Elle est amie avec Marshall, qui lui est sous le joug de Chad, un garçon qui vient de changer d'école. Il l'a pris en grippe d'entrée de jeu, et ne veut pas le lâcher, lui rendant la vie impossible. Plus personne ne daigne parler à Marshall, qui est constamment isolé. Nos deux amis préfèrent encore se perdre dans une forêt qu'ils ne connaissent pas, plutôt que d'affronter Chad, ce qui en dit long sur leur malaise...

Pourtant, sous cette carapace de brute se cache en réalité un garçon qui souffre lui aussi, mais pour d'autres raisons. Ce qui est très intéressant dans ce roman, c'est que les trois héros vont être forcés de communiquer pour s'en sortir dans la forêt et donc d'aborder ce genre de questions ensemble. Marshall n'avait auparavant jamais compris pourquoi Chad s'en prenait constamment à lui, et va ainsi le découvrir.

L'histoire se déroule sur fond de drame scientifique. La boue trouvée dans la forêt, de couleur verdâtre, est en réalité contaminée par une sorte de bactérie à haute énergie, déployée à l'origine pour être utilisée comme carburant. Malheureusement non contrôlée, elle s'est multipliée jusqu'à devenir néfaste pour l'homme. Le récit alterne entre l'histoire principale et des interviews scientifiques. Cela nous permet de mieux comprendre d'où sort cette boue toxique, et quelles en sont les conséquences.

A vouloir aborder plusieurs thématiques, je trouve que l'on se perd. J'ai fait une pause juste au moment où Tamaya rentre chez elle, et qu'elle s'aperçoit que son bras est contaminé. J'ai alors imaginé qu'elle allait être dotée de super pouvoirs, et que j'allais embarquer dans quelque chose de fantastique, semblable à la série Les Incroyables pouvoirs d'Alex - pour ceux qui connaissent ! Pourtant c'est un tournant bien différent que prend le roman. Je pense que je m'attendais à quelque chose de plus léger, mais c'est quelque chose de relativement pesant que j'ai trouvé - même les pages finissent par être envahies de bactéries ! La plume de Louis Sachar reste tout de même très agréable, ça, on ne peut pas le nier. Malgré tout, la combinaison harcèlement scolaire / thriller écologique n'a pas fait de ce roman un coup de cœur pour moi. Je pense tout de même que le suspens est au rendez-vous et pourrait en faire un roman plaisant pour les personnes avides du genre !


 

dimanche 5 juin 2016

Sauveur & Fils

Il a le nom de l'emploi, ça on peut le dire ! Sauveur Saint-Yves est un psychologue d'origine martiniquaise, débarqué en métropole il y a peu avec son unique fils, Lazare. A la tête de son propre cabinet, il accueille des patients, notamment de jeunes patients avec des troubles qu'il va devoir tenter de comprendre et d'apaiser. 
A 14 ans, Margaux souffre et cela se traduit par de multiples coupures sur les bras qu'elle s'inflige dès qu'elle a trop mal. Ella, 12 ans, ne supporte plus de mettre les pieds à l'école. Une phobie qui l'empêche de vivre. Cyrille est un jeune garçon de 9 ans qui, depuis peu, se remet à faire pipi au lit la nuit. Quelle est la cause de ce changement soudain ? On découvre également les trois sœurs Augagneur dont la vie est chamboulée le jour où leurs parents divorcent, leur mère quittant leur père pour une femme.
Pourtant, sous son apparence bienheureuse, Sauveur a un passé. Celui-ci refait surface sous la forme de mystérieux quimbois, sortilèges vaudou, déposés chez lui. 
Qu'est-ce qui a réellement poussé Sauveur à fuir la Martinique ? Pourquoi n'arrive-t'il toujours pas à évoquer l'accident qui a emporté la mère de Lazare ? 

Vous l'aurez compris, ce roman regorge de secrets que l'on découvre au fil de notre lecture ! 
D'une part, on suit les patients sur plusieurs séances, ce qui permet de dénouer le problème et surtout, de comprendre l'origine des troubles présentés par les enfants - il ne s'agit pas là de causes médicales. Chaque trouble est en réalité la face visible de l'iceberg. La face cachée : un événement passé sous silence ou un bouleversement immense dans la vie de ces ados ou pré-ados.

Le récit laisse une grande place au dialogue. Le cabinet de Sauveur, c'est un espace de parole, d'échanges, on s'y sent bien - même toi lecteur, tu verras. Sauveur se contente la plupart du temps de répondre par des questions, ce qui fait que l'on s'interroge aussi pas mal. Bien sûr, l'adolescence est au centre des propos, puisque c'est un âge particulier, durant lequel on peut se heurter au mal-être ou chercher sa place. Pas que. Car la difficulté de cet âge, ce sont aussi les relations familiales. Elles sont un enjeu crucial dans le roman.
 
En parlant de famille, il était habile que Sauveur et son fils Lazare ne soient pas épargnés par le sort. En effet, ils sont la preuve que tout le monde peut être touché. L'homme fait des erreurs, ou se retrouve dans une situation où il est parfois impuissant. Il arrive que Sauveur soit en proie au doute quant à son métier, à son rôle. Est-il possible de "sauver" les gens ? Ou bien est-il là pour aider les gens à se sauver eux-mêmes ?

Ce roman est un vrai bouillonnement de réflexions philosophiques, et, en ça, je l'ai trouvé juste grandiose. Tout est subtilement amené, jusqu'à ces deux hamsters qui permettent de faire de nombreux parallèles avec l'humain. Sans parler de l'exotisme martiniquais qui apporte une touche de fraîcheur bienvenue face à des événements plus sombres. Il s'agit là d'une saison 1, donc il est bien possible que l'on retrouve notre psychologue favori pour de nouvelles aventures prochainement !

Petite note. Je viens de lire à la fin du roman que l'animal sur la couverture est en réalité un cochon d'Inde, et non un Hamster (je n'avais pas réalisé) ! - ça valait bien un abonnement Instagram de plus à @boobooandfriends